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BIERBUIK-BLOEMEKE : FLORENT LADEYN BRASSE DES BIÈRES DE CUISINIER 100% LOCALES

Après l’Auberge du Vert Mont et Bloempot, le trublion de la cuisine du Nord, Florent Ladeyn, casse à nouveau la baraque avec Bierbuik-Bloemeke, un lieu trois en un, estaminet-cantine-brewpub installé à Lille. En plus de ses collaborations avec des brasseurs du coin, ce chef précurseur se lance enfin dans la production de sa bière dans ce nouveau local. Barmag a filé vers la capitale des Flandres pour rencontrer cette personnalité haute en saveurs nordistes.

Bierbuik-Bloemeke vient d’ouvrir ses portes à Lille
© Caspar Miskin / © Alexandra Battut

29 mars : 14 heures. Le service du déjeuner du nouveau « place to be » de Lille s’achève tranquillement. Quelques clients s’attardent avec leur tasse de chicorée au Bloemeke (Petite fleur en flamand), le restaurant au style scandinave au premier étage. Au rez de chaussée, quelques retardataires se régalent de frites au Maroilles arrosées d’un verre de bière sur les grandes tablées de Bierbuik (Ventre à bières), l’estaminet au décor teinté de rose et de noir.

Les recettes des bières Bierbuik sont inspirées par la cuisine et réalisées avec des produits locaux. © Caspar Miskin / © Alexandra Battut

De la cuisine ouverte on aperçoit quatre cuves de fermentation rutilantes et impatientes d’accueillir leurs premiers brassins. La carte de l’estaminet propose déjà quelques bières élaborées avec des brasseurs amis de la maison : Reine des P…, une douce pils à la reine des prés ; Sourdough Kettle, une intrigante sour ensemencée au levain de seigle ; Pimp my beet, une pimpante ale à la betterave, cassis et mûre, et Romarijn straat, une gourmande ale à la patate et romarin. De bien belles mousses sous influence culinaire locale et à la sauce Florent Ladeyn. Le chef faisant sa pause, c’est le moment d’en profiter pour lui poser quelques questions.

Au commande : le chef nordiste Florent Ladeyn

Est-ce que la bière artisanale a toujours été présente dans vos deux premiers restaurants ?

J’ai toujours été un fan de bière. Lorsque j’ai repris les commandes de l’Auberge du Vert Mont en 2007, j’ai enlevé de la carte les bières classiques belges pour mettre en avant des brasseurs artisanaux du Nord comme Daniel Thiriez.

Quel est votre style de bière préférée ?

Aujourd’hui, je ne me régale plus avec les IPA qui ont inondé le marché, ni avec des bières trop alcoolisées comme les coffee stout, excepté à la fin d’un repas. J’aime boire des choses légères en degré alcoolique. On est d’ailleurs parti sur ce créneau pour nos propres créations. Je reprendrais une expression de Daniel Thiriez : « Une bonne bière se juge à la buvabilité » !

Les frites maison avec une émulsion au Marouilles sont déjà un best-seller de la carte.
© Caspar Miskin / © Alexandra Battut

Vous avez commencé à brasser avec la Brasserie du Pays Flamand pour vos bières servies à l’Auberge du Vert Mont et à Bloempot. Quelles ont été vos premières recettes ?

La Brasserie du Pays Flamand, c’est avant tout des copains. Ceux sont les premiers à qui nous avons parlé du projet de créer nos propres bières, et ils ont tout de suite été séduits. Notre première bière était inspirée d’une recette du restaurant axée sur l’acidité, à base de concombre, de petit lait de chèvre et verveine. Je trouvais qu’elle serait parfaitement adaptée pour une Berliner Weisse et le brasseur Olivier Duthoit a totalement validé l’idée. Comme en cuisine, nous travaillons uniquement nos bières avec des produits locaux. Cette première création était composée de 22% de purée de concombre bio des Flandres. Nous avons également réalisé une bière portée sur le salé, la Gose Boyster à partir d’une décoction de coquille d’huître de Gravelines et 18% de purée de rhubarbe.

Florent Ladeyn s’est associé avec Kevin Rolland du Bloempot et Clément Dubrulle, son cousin et chef de l’Auberge Vert Mont © Caspar Miskin / © Alexandra Battut

Vous venez d’ouvrir Bierbuik-Bloemeke associé à Kevin Rolland à la tête du Bloempot et Clément Dubrulle votre cousin et chef du Vert Mont après deux ans de travaux. Le projet ne devait être pas concentré uniquement sur un brewpub ?

Le retard pris par les travaux nous a donné lieu à repenser le projet. Il fallait trouver une solution pour rentabiliser les frais supplémentaires. Nous avons donc décidé d’élargir le concept du brewpub avec un restaurant au premier étage proposant un menu unique à 25 €. C’est une prolongation de la cuisine locale du Bloempot qui passe désormais sur deux menus de dégustation « Les yeux fermés » à 40 et 60 €.  

Bierbuik un estaminet nouvelle génération © Caspar Miskin / © Alexandra Battu
Bloemeke, une prolongation de la cuisine du Bloempot © Caspar Miskin / © Alexandra Battut

Vos recettes de bière sur la carte de Bierbuik s’inspirent toujours de la cuisine avec des ingrédients comme la pomme de terre, la reine des Prés et la betterave. Vous n’avez aucune limite dans le choix des ingrédients ?

Nous avons une seule limite, c’est le bon. Un seul de nos essais pour l’ouverture ne s’est pas avéré concluant / c’était une sour à base de groseilles à maquereau et d’estragon. La bière était malheureusement infectée et nous avons dû la jeter. Les premières bières de Bierbuik n’ont pas été faites sur place car l’installation complète de l’électricité vient juste d’être finalisée et il faut quatre semaines pour élaborer une bière. Nous disposons de quatre cuves de fermentations de 1000 litres chacune et nous avons pour ambition de réaliser un brassin par semaine destiné à nos trois établissements. Nous enfûterons nos bières directement à cause du manque de place et de moyen pour investir dans une embouteilleuse.

La microbrasserie de Bierbuik compte 4 cuves de fermentation de 1000 litres chacune

Toute l’équipe va mettre la main avec la patte, avec le soutien d’Olivier Duthoit de la Brasserie du Pays Flamand qui poursuit notre formation. Depuis le début, on brasse tous ensemble, on teste, on goûte, et on modifie la recette. On fait comme en cuisine, en introduisant de vrais produits dans la bière. Nous insistons sur le côté local, c’est une vraie contrainte dans l’univers de la bière. Nous ne produirons pas de bières très houblonnées pour l’instant car on ne cultive pas encore en Hauts-de-France de houblons qui se prêtent pour des IPA. On attend d’ailleurs les premiers houblons d’Edouard Roussez produits à Hazebrouck.

Trouve-t-on des accords mets et bières dans ce nouvel établissement ?

Oui, nous avons découvert que la ale à la pomme de terre et romarin s’accordait très bien avec du poulet cuit au feu de bois et laqué au jus de champignon fermenté.

Ici on travaille aussi les accords mets et bières © Caspar Miskin / © Alexandra Battut

Quelles sont les autres bières sélectionnées sur la carte ?

Elles sont essentiellement locales et viennent de producteurs avec qui nous avons déjà brassé à quatre mains. On refuse toutes propositions de bières à la mangue ou à la banane car elles ne sont pas cohérentes avec notre philosophie. En cuisine, les chefs ont une prise de conscience par rapport aux produits locaux et à leur usage. En pâtisserie, aucune. Et dans la bière, pourquoi des brasseurs sortent des bières au fruit de la passion alors qu’on dispose ici de baies d’argousier ? Je pense que progressivement les brasseurs vont commencer à mettre l’accent sur le local.

Santé ! © Caspar Miskin / © Alexandra Battut

Quel regard avez-vous sur le monde de la bière du Nord ?

J’aime beaucoup le travail de la jeune Brasserie du Singe Savant basée à Lille et aussi celui de Cambier installé à Croix. La brasserie propose certaines de ses bières uniquement à son brewpub. Et bien sûr les grands incontournables comme la Brasserie du Pays Flamand. J’ai beaucoup d’humilité par rapport à ce métier que je suis en train de découvrir. Au final, cela reste des recettes, c’est l’espace-temps qui diffère. En cuisine, on peut goûter sur l’instant, dans le monde de la bière, il faut attendre plusieurs semaines. Je dois m’habituer à cette contrainte.

Bierbuick-Bloemeke 19, rue Royale 59800 Lille. www.bierbuik.fr

Écrit par Laurence Marot

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