Dario Knox figure parmi les pionniers de la scène cocktail de Singapour. Il présente ici une nouvelle technique pour réaliser des cocktails.
Dario, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Je suis Dario Knox, je travaille dans le secteur des bars depuis 21 ans dans le monde entier. Ma carrière a pris un tournant majeur vers la fin de l’année 2011 lorsque, après avoir vécu en Italie, au Royaume-Uni et en Espagne, j’ai emménagé à Singapour, où j’ai été amené à ouvrir l’un des tout premiers bars à proposer un programme de cocktails. Dernièrement, j’ai inauguré The Backdrop.
Qu’en-est-il de The Backdrop ?
L’un des aspects les plus passionnants est le lancement de nos cocktails percolés. Cette technique est un changement fondamental dans notre approche de l’extraction des saveurs et de la création de cocktails. Aussi, de l’éclairage à la musique, chaque détail a été soigneusement étudié pour offrir une expérience multisensorielle.
Quid de la technique de percolation ?
Cette technique pour extraire les arômes botaniques de l’éthanol est ancienne mais c’est au XIXe siècle que s’est développée la méthode d’utilisation de l’éthanol pour percoler, souvent appelée « percolation à froid » ou « extraction à l’éthanol ». Elle était principalement utilisée dans la production de teintures à base de plantes, de médicaments, de certains spiritueux tels que le gin et le vermouth. Les méthodes comme la macération, les infusions et autres reposent souvent sur le temps et parfois sur la chaleur, ce qui peut entraîner des saveurs confuses ou incohérentes. Avec la percolation, nous sommes capables d’extraire uniquement les saveurs essentielles.
Comment cela marche-t-il exactement ?
Bien que la percolation soit une pratique centenaire, elle n’a certainement jamais été appliquée à des cocktails préparés à la minute à partir d’un seul ingrédient. La percolation fonctionne en faisant passer un alcool neutre, généralement à un volume d’alcool (ABV) réduit, à travers des plantes à un rythme lent et contrôlé. Contrairement au trempage, où les plantes restent dans l’alcool pendant de longues périodes, ou au secouage, où les saveurs sont rapidement combinées, la percolation permet une extraction précise des composés aromatiques. Le processus garantit que seules les saveurs souhaitées sont capturées : il n’y a pas de brûlure d’alcool trop forte, ni de confusion des saveurs. On peut également contrôler exactement le pourcentage d’alcool en lien avec le point de dilution choisi. Une autre différence est la texture : en éliminant les impuretés, nous obtenons un produit qui ressemble presque à une essence pure. Il n’y a plus besoin de shaker, de verre à mélange, de glace…
Comment est-ce reproductible dans d’autres bars ?
Bien que le monde de la boisson semble de plus en plus tourné vers les équipements sophistiqués (rotovap ou centrifugeuse), il y a encore beaucoup à apprendre du passé. Une configuration de base impliquerait une chambre de percolation ou un système de filtration conçu pour faire passer lentement l’alcool à travers les plantes, ce qui est un point de départ très simple et abordable. La chose la plus importante est de commencer à faire des recherches sur la façon de traiter et d’aborder chaque plante et son extraction : un timing différent, un ratio différent, un pourcentage différent d’éthanol. Vous devez soigneusement calibrer le ratio plantes/alcool. En effet, un excès d’alcool peut dominer les plantes, tandis qu’une insuffisance d’alcool peut entraîner un profil de saveur faible.