Calvados, pommeau, cidre… Face à la crise sanitaire et grâce au dynamisme de ses acteurs, le monde des produits cidricoles de Normandie n’a pas perdu ses couleurs ni ses saveurs. Innovation, écologie, mixologie… tour d’horizon d’une filière en pleine résistance.
Un vent de modernité du côté du calvados
Un visuel cadré sur un panier de supermarché rempli de junk food asiatique et d’une bouteille de calvados : ce n’est pas une image tirée d’un magazine hype mais la page d’ouverture du nouveau site, au style ultracontemporain, dédié au calvados, drinkcalvados.com.
Lancée en 2021 par l’Interprofession des appellations cidricoles (Idac), cette vitrine de l’eau-de-vie normande souhaite mettre fin à sa réputation d’eau-de-vie planquée au fond d’un placard. Chic, authentique, naturel, le calvados est désormais animé par un souffle et porté et par la nouvelle génération de grandes maisons familiales.
Des innovations qui suivent les tendances des autres catégories
Christian Drouin, Domaine du Coquerel, Roger Groult, Dupont… ces mousquetaires du calvados ont bousculé les codes de l’AOC normand : il s’agit de partir en quête de consommateurs plus jeunes et friands de spiritueux locaux.
Premier passage obligé pour les attirer : un relooking chiadé du packaging. Le dynamique domaine du Coquerel a revu ses étiquettes en mettant en lumière l’emblème du manoir « la Girouette » et sa typo plus gothique pour ses éditions limitées.
Autre phénomène de fond, qui touche parallèlement de nombreux spiritueux : un travail sur l’affinage afin d’enrichir la palette aromatique du calvados avec un fût ayant contenu un autre alcool. Bel exemple avec la maison Roger Groult, qui a démarré sur ce créneau en 2014. Sa dernière cuvée, un 10 ans d’âge affiné en ex-fûts de banyuls, révèle une belle rondeur. Autre preuve de son élan de modernité : l’AOC s’investit dans les tendances du marché, le Single Cask et Brut de Fût tel que la maison Dupont et sa cuvée 50 ans non réduite à 52%. Un bijou de saveurs.
À l’instar de l’armagnac, le calvados s’intéresse à la blanche (hors du cahier des charges de l’AOC) déployant des saveurs inédites. Le trublion domaine Christian Drouin a lancé sa blanche bio à 46% produite à partir de 20 variétés de pommes, issue d’un verger haute tige et double distillée et vieillie en cuve Inox. Un liquide tout en finesse, offrant un vaste champ d’action en cocktails.
Une nouvelle communication sur l’environnement
Le saviez-vous ?
Le calvados est l’un des spiritueux les plus écologiques du marché des spiritueux. La nouvelle marque Avallen, lancée par 2 Anglais venus du groupe Diageo, prône ses vertus écoresponsables. Chaque bouteille élimine 2,730 kg de CO2 de l’atmosphère, équivalant à 21 km de route dans une voiture moyenne. En effet, l’écosystème de la production du calvados s’inscrit dans une démarche écologique. Il faut savoir qu’un verger de pommiers, berceau de biodiversité et d’insectes pollinisateurs, peut capter jusqu’à 35 tonnes de carbone par hectare. L’usage des pesticides est prohibé, tout comme l’irrigation des vergers.
Une aubaine pour sauver la planète !
Un spiritueux convoité par les barmen
Fini le traditionnel café-calva au comptoir !
Le calvados s’affiche la tête haute au sein des cartes de prestigieux bars à cocktails. Qui n’a pas goûté le célèbre Serendipity, un genre de mojito grand luxe à base de calvados, jus de pomme, menthe et champagne au bar Hemingway au côté de son créateur Colin Field ?
La jeune génération de barmen s’est également entichée de ses qualités aromatiques : le fruité, la fraîcheur et la rondeur, pour imaginer des cocktails explosifs. Le succès du nouveau concours de cocktail, #CalvaClub, organisé par l’Idac, témoigne de cette aura : 67 participants accompagnés de vidéos pimpantes de leur création, et 12 finalistes conviés dans La Mecque de la pomme les 30 et 31 mai. Le vainqueur aura l’honneur de représenter la catégorie à la prochaine édition de Bar Convent Berlin.
Un sacré pari !
Un dynamisme identique de la part des autres produits cidricoles normands : cidre, pommeau…
À l’image du calvados, les autres alcools à base de pommes fermentées – le cidre – et distillées – le pommeau – renforcent progressivement les étagères des cavistes, comme ils séduisent l’univers du bar et de la restauration pour leurs valeurs ajoutées.
« Le cidre connaît un vent de modernité au début des années 1990, sous l’impulsion de producteurs inspirés par le vin. Ils lui ont redonné ses lettres de noblesse. Aujourd’hui, cet alcool fermenté attire une cible de 20-35 ans en quête de sens par rapport ce qu’elle boit. Le cidre est un produit naturel, allégé en alcool, sans gluten et sans besoin d’eau pour sa production, contrairement à la bière », détaille Jean-François Bougeant, propriétaire de la cave et épicerie fine à Étretat « la Mer à boire », et président de l’association CidrExpo qui porte le salon visible sur le site Cidrexpo jusqu’à fin 2021.
Le pionnier de cette vague, Éric Bordelet, sommelier d’origine installé en Normandie méridionale, sélectionne avec soin ses pommes à la main, selon leur maturité, pour ses cuvées gastronomiques stylées.
Quant à la maison Hérout, basée dans la Manche, elle privilégie le terroir avec un verger 100% bio. Elle travaille en « méthode ancestrale », avec une prise de mousse naturelle en bouteille. Le résultat : un cidre AOC Cotentin assez sec et réputé pour son amertume. Idéal pour un spritz !
À découvrir également chez la maison Dupont : le premier cidre tranquille monovariétal, Blanc de Pomme aux arômes minéraux.
Avis aux amateurs du petit frère du calvados, encore méconnu : le pommeau, assemblage de jus de pomme frais et de calvados, fait son come-back dans la mixologie. Poussé par l’Idac (nouveau site pommeaudenormandie.com), ce produit régional vient s’afficher sur les plages de Normandie avec une recette de cocktail accessible et rafraîchissante : Pocito, un pommeau version tonic agrémenté de jus de citron.