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LE RENOUVEAU DU NAVY RUM AVEC ALEXANDRE GABRIEL

Publié en 2024, le livre « Exploring 300 years of Royal Navy Rum and Its Techniques » est l’oeuvre conjointe d’Alexandre Gabriel, de la Maison Ferrand, et de l’historien Matt Pietrek. Il sortira en VF en Septembre. Rencontre avec l’un des coauteurs, qui est bien décidé à raviver la flamme du rhum de la Royal Navy.

Quelle est la genèse de ce livre ?

J’ai rencontré Matt Pietrek lors de mes masterclass à une époque où il était encore ingénieur chez Microsoft, à Seattle. Il était connu pour son blog dédié au rhum CocktailWonk. Très vite, j’ai perçu chez lui un palais affûté et une manière unique de poser des questions presque « geek » sur les spiritueux. Un jour, il m’a confié son désir de quitter la tech pour se consacrer pleinement à sa passion pour le rhum. 

À ce moment-là, je m’intéressais au Navy Rum, ce rhum légendaire étroitement lié à la Royal Navy britannique apparu autour de 1655, soit peu après la naissance du rhum à la Barbade. Distribué aux soldats à raison de 28 cl par jour, il a affiné leur palais et façonné une culture. J’ai voulu en savoir plus sur ses méthodes de fabrication, son style d’assemblage, son degré d’alcool. Et j’ai immédiatement pensé à Matt pour m’aider à approfondir le sujet. 

Il avait la rigueur d’un historien (à la manière de David Wondrich) et cette curiosité insatiable propre aux vrais passionnés. Grâce au soutien de la Fondation Ferrand, nous avons pu lui confier une mission de recherches en profondeur dans les bibliothèques et les archives.

Ce livre est le fruit de 4 années de travail minutieux et d’écriture partagée. Il a été publié chez Wonk Press, la maison d’édition de Matt, qui est aujourd’hui un célèbre historien du rhum.

Comment avez-vous structuré le livre ? 

Matt a rédigé la première partie, avec un travail d’archives particulièrement rigoureux. De mon côté, j’ai apporté mon regard de technicien pour la seconde partie. Mon objectif : comprendre ce qui, sur le temps long, constitue l’ADN du Navy Rum. 7 piliers se sont imposés, hérités de l’époque où la Royal Navy élaborait elle-même ses assemblages. Car le Navy Rum, c’est un peu le patriarche de tous les rhums.

Quels sont ces 7 piliers que vous avez réussi à définir ?

Le premier pilier repose sur l’assemblage de rhums issus des anciennes colonies britanniques, en particulier la Barbade et la Jamaïque. Comme en cuisine, où la nécessité a souvent dicté les recettes, le Navy Rum répondait avant tout à une contrainte pratique : remplacer la bière et le vin, trop fragiles pour les longues traversées. Le rhum s’impose, plus stable, plus fort. Assemblé sur les docks de Londres au bord de la Tamise, il devient un style à part entière : le Dock Rum, l’un des rares spiritueux d’assemblage, à l’image du whisky japonais. 

À noter : pendant la Seconde Guerre mondiale, les Allemands bombardèrent ces docks pour priver la Navy de son ravitaillement en rhum. 

Le deuxième pilier, c’est le double vieillissement. Le rhum mûrit d’abord sous les tropiques, puis poursuit son affinage dans les entrepôts londoniens où l’humidité singulière des docks, présente depuis le XVIIIe siècle, sculpte sa texture et sa complexité.

Troisième pilier : l’usage de fûts de réemploi. Xérès, porto, madère… Autant de contenants qui ont marqué de leur empreinte le rhum, ajoutant des couches d’arômes et de subtilités à l’assemblage final. 

Vient ensuite le vieillissement dynamique en mer : le quatrième pilier. À bord des navires, les fûts en bois sont brassés en permanence par le roulis, favorisant une interaction intense entre le rhum et le bois. Résultat : un profil aromatique plus riche, plus profond.

Cinquième pilier : le stockage dans les fameuses cuves en bois ouvertes des docks londoniens, partiellement remplies. Ce procédé unique permet une circulation progressive des rhums assemblés, de se fondre harmonieusement, et de descendre naturellement à […]

Écrit par Laurence Marot

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