Le chef barman de l’hôtel étoilé Castelbrac, basé à Dinard, sort un premier documentaire sur sa chaîne YouTube. Cette vidéo long format, présentée sous forme de fable en 7 actes, fait référence à son amour pour la Bretagne, sa terre d’adoption, autour de mélanges créatifs. Rencontre avec un barman aux multiples talents.
La vidéo est un format que tu exploites régulièrement pour mettre en lumière tes cocktails. Raconte-nous la genèse de ce documentaire poétique filmé en Bretagne.
C’est en 2016 que j’ai réalisé mes premières vidéos autour de mes créations cocktails. Aujourd’hui j’en compte 40 à mon actif, d’une à deux minutes. Cette fois, la Mécanique des cocktails est une sorte de long-métrage pour le monde de la mixologie, d’une durée de plus de 20 minutes. C’est vrai que les vidéos très courtes comme celles de TikTok marchent très bien mais c’est quelque chose que je n’aime ni ne sais faire. Mon ambition est de raconter une histoire dans un univers particulier, puis de la partager. Pour ce premier documentaire, la Bretagne et son environnement ont été ma source d’inspiration.
Nous avons entamé le tournage en mars, en pleine crise sanitaire, pour terminer début juin. Le film a été entièrement tourné avec un téléphone portable par ma petite amie Soizic Leterreux, qui travaille aujourd’hui à mes côtés pour la création des vidéos. C’est elle également l’autrice des dessins visibles dans le documentaire. Le film réunit tout une série de lieux bien distincts présentant les différents univers de chaque acte et les créations cocktails.
Pour accéder à certains endroits, fermés au public pendant le confinement Il a fallu s’armer de patience. C’est le cas de la maison sculptée de Jacques Lucas, un lieu magique filmé pour le deuxième acte. L’échange avec cet artiste breton s’est avéré parmi les moments les plus intenses du tournage.
À côté de ton métier de barman, tu as d’autres cordes à ton arc : l’écriture et le montage. Quelles sont tes sources d’inspiration dans les domaine littéraire et cinématographique ?
J’adore l’écriture, que je pratique depuis quelques années pour mes vidéos, et je me suis découvert une vraie passion pour le montage, que j’ai élaboré seul pour ce documentaire. Pour l’instant, la partie voix off n’est pas mon fort. En grand perfectionniste, j’ai dû faire 80 enregistrements pour l’un des passages du documentaire. Afin de peaufiner cette partie, je compte suivre des cours de théâtre.
Mes sources d’inspiration ? Le style poétique de l’écrivain, musicien et chanteur Mathias Malzieu, et le ton du réalisateur Tim Burton.
Dans ce documentaire travaillé comme un conte, la nature est très présente. Elle t’inspire aujourd’hui pour tes créations cocktails ?
La maturité m’a amené à me recentrer sur la nature qui offre des formes, des couleurs incroyables pour imaginer tout un panel de recettes de cocktails. On constate d’ailleurs que le monde du bar respecte la saisonnalité des produits.
La Mécanique des cocktails exprime la quintessence de ta créativité. Quelle est justement ta mécanique pour imaginer un cocktail ?
Je travaille sur une règle que j’ai imaginée, « UTE », et je la développe dans mes interventions dans les lycées hôteliers de la région. U comme Univers qui doit taper à l’œil. T comme technique. Je dresse un champ lexical que j’associe à un goût, c’est-à-dire le word pairing. Et enfin E comme Emotion, associée à un visuel, un univers.
Cette technique permet de canaliser ses idées avant d’entamer la création d’un cocktail.
On découvre toute une panoplie de spiritueux de Bretagne ou de France pour concocter tes cocktails. Comment les as-tu sélectionnés ? On ne voit pas de whisky, pourtant en plein essor, dans ce film.
Je n’ai conclu aucun partenariat avec des maisons de spiritueux. Je les ai tous choisis selon mes inspirations et l’univers de chaque cocktail.
2 produits viennent de Bretagne.
Le gin Malouin’s Rose pour le cocktail de l’acte III, « Du pays des merveilles à 2050 ». Nous le travaillons beaucoup au bar de l’hôtel Castelbrac.
Pour l’acte 2, « Au pays des merveilles », j’utilise l’absinthe et le gin de Cherry Rocher, une distillerie de Savoie qui m’a séduit par la qualité de ses produits et son packaging.
Pour l’acte 5, « De Merlin au réveil », le petit déjeuner est agrémenté de la liqueur de café de Fair et du calvados de la maison Jouffe, basée à Dinan.
En effet, le whisky français est absent. Pourtant, je dois avouer que récemment, j’ai eu un coup de cœur pour le travail de l’embouteilleur indépendant Benjamin Kuentz. Je viens de plancher sur un cocktail avec sa cuvée Fin de Partie, et je compte poursuivre ma collaboration avec d’autres de ses whiskys.
Le dernier acte dévoile une autre facette de ta personnalité : l’amitié. Qui sont ces 2 acolytes ?
Ils sont des amis d’enfance qui ne sont pas barmen ni bretons mais qui viennent de Chartres. Je souhaitais finir par une note différente, celle de l’amitié. Nous avons tourné cette scène le premier jour du déconfinement avec un bar en plein air, en montrant toute l’accessibilité du monde du cocktail.