Quel est ce nom barbare, qualifiant ces eaux gazeuses alcoolisées ? Débarquée tout droit des US, cette nouvelle catégorie de boissons en pleine explosion, plébiscitée pour son taux de sucre zéro et son régime low calories, largue enfin ses canettes sur le territoire français. Découverte de ce produit phénomène qui fait frissonner le monde de la bière et attire nos entrepreneurs.
Bières et spiritueux sans alcool, aujourd’hui « hard seltzers » : l’univers de la boisson est en pleine mutation avec l’arrivée de catégories en mode healthy. Née aux États-Unis en 2013, cette eau gazeuse alcoolisée au goût de fruit s’est à présent imposée sur le marché américain avec un nombre explosif de 65 marques et des ventes abracadabrantes estimées à 2,7 milliards de dollars au cours des 12 derniers mois. Et un pic des ventes de 193% en 2019 (source Nielsen) ! « C’est la plus grande révolution du marché des boissons depuis les années 1970 et la création de la bière légère », précise Yann Casen, cofondateur de la société Cobex qui a lancé en France le hard seltzer Snowmelt.
Pourquoi pareil engouement ? Cette nouvelle vedette des boissons affiche sur sa canette des arguments très convaincants : peu de calories (environ 28 calories pour 100 ml, c’est-à-dire 1,5 fois moins que la bière et 2,5 fois moins que le vin rosé) ; peu de sucre, voire zéro ; un degré d’alcool allégé, entre 4 et 6 degrés ; sans gluten et avec des arômes naturels. Bref, que du bénéfice pour les personnes soucieuses de leur ligne et de leur santé.
« La catégorie a pourtant mis quelques années pour séduire ses consommateurs car son message manquait de clarté. »
Yann Casen
« Bon & Viv, aujourd’hui sous la houlette de AB InBev, représente la première marque de hard seltzer mais c’est la société Mark Antony Brands et sa marque White Claw, créée en 2016, leader aujourd’hui dans la catégorie, qui a créé l’engouement durant l’été 2019, en expliquant tous les arguments nutritionnels de cette boisson », rajoute Yann Casen.
Véritable alternative aux boissons emblématiques de l’apéritif, au vin et à la bière, cette eau alcoolisée rafraîchissante non genrée répond à l’attente des consommateurs, notamment la tranche des millennials, en quête d’un produit à la fois festif et sain pour leur corps. Selon l’étude du cabinet Nielsen, 55% des Américains amateurs d’alcool consomment cette boisson une fois par semaine. « Le hard seltzer grappille des parts de marché sur le vin et sur la bière », constate Yann Casen. Une nouvelle catégorie qui s’impose comme un bulldozer sur le marché concurrentiel de la boisson alcoolisée.
Un mode de production proche de la bière
Couleur cristalline, fines bulles, doux parfums naturels de fruits, goût discret d’alcool… la majorité des hard seltzers proviennent d’une longue fermentation à base d’eau, de sucre de canne et d’une levure très active (pour produire l’alcool), laquelle peut être brassée telle une bière. Alertés par les statistiques exponentielles de cette eau alcoolisée, nombre de brasseurs industriels et artisanaux se sont lancés.
Du côté des grands groupes, AB InBev a décliné sa bière Budweiser avec la marque Lime-A-Rita, à base d’orge maltée et Corona avec Refrisas, à base de fruits exotiques. Même combat chez Carlsberg avec Garage Hard Seltzer, au parfum de citron et citronnelle-framboise uniquement sorti en Norvège ; et chez Heineken avec Pure Piranha, destiné aux marchés du Mexique et de la Nouvelle-Zélande. Malheureusement, leur lancement n’est pas prévu en France.
L’arrivée sur le marché de marques françaises
Cette tornade américaine des eaux pétillantes alcoolisées a inspiré certains entrepreneurs créatifs comme les 2 jeunes Valentin Bros et Florentin Cugnot, anciens étudiants d’école de commerce et fondateurs de Natz, première marque tricolore de hard seltzers à se lancer en France. Écoutons Valentin : « Pendant nos études, nous avions monté notre cave de vin et champagne. Au bout de 6 mois, on a pris du recul sur les différentes catégories d’alcool pour proposer une alternative qui corresponde davantage aux modes de consommation actuels. On s’est rendu compte que la jeune génération consomme de plus en plus healthy. On a fait des recherches et on a découvert l’explosion aux US du hard seltzer. On a goûté les produits américains et, déçus par leur goût, on a imaginé une boisson différente pour le marché français. »
Après plusieurs tests et une collaboration avec des vignerons, distillateurs et brasseurs de renom, le duo découvre tout l’intérêt de la levure pour créer le hard seltzer parfait sans malt ni raisin, dans un milieu de fermentation pauvre. « Nous produisons aujourd’hui nos boissons avec le brasseur Dirk Naudts, de la brasserie belge De Proef. Ce dernier a une connaissance pointue de la fermentation et possède une bibliothèque de levures qui ouvre un vaste champ de possibilités pour de futurs produits », précise Valentin Bros.
La recette finale de Natz ? Un process de basse fermentation complète de sucre de canne dans de l’eau pendant 14 jours, avec 2 choix d’infusion, avec du jus de citron et du thé noir.
Comparativement à ses confrères, cette boisson n’est pas filtrée et est présentée en format bouteille et non canette. Distribuée des points de vente sélectifs depuis juillet comme le bar à vins parisien Stéréo, la jeune marque cible un moment de consommation en début d’apéritif. « Elle a l’effet enivrant d’une bière, sans les mauvais effets du sucre. » Le hard seltzer, la future boisson chouchou des Français ?