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COUVRE-FEU : LES BARS ONT-ILS ÉTÉ LES BOUCS ÉMISSAIRES ?

Mise en place de collectifs à l’instar de Restons Ouverts. Bars improvisés dans le métro de l’Assemblée nationale. Funérailles de la restauration organisées par l’Association du village d’Oberkampf. Opération escargot sur le périphérique caennais… Face au couvre-feu, les acteurs du CHR ont multiplié les actions. D’autant plus que rien n’atteste vraiment de leur rôle dans la propagation du virus. Conséquences et analyse.

Pour les cafés-hôtels-restaurants, le couvre-feu instauré par l’État français apparut comme un coup fatal. Dans les faits, un vent de révolte souffla et dans le secteur et auprès des consommateurs. Pour trouver le dernier couvre-feu dans la capitale, il faut remonter à 1961 et aux heures sombres de notre histoire. À l’époque, sous l’égide du préfet de police Maurice Papon, les attentats répétés du FLN contre les forces de l’ordre en avaient été le détonateur. Aujourd’hui, l’ennemi est invisible et se nomme coronavirus…

Si le confinement s’était révélé une épreuve, le couvre-feu, lui, n’était guère moins douloureux.

Pour chacun d’entre nous à titre individuel, il fut une atteinte profonde à notre liberté ; pour l’économie, un pavé dans la mare qui aura des séquelles à court et à long terme, avec en première ligne le secteur du CHR.

« Alors que les établissements subissent déjà des pertes importantes d’activité en raison des restrictions de leurs capacités d’accueil et d’un protocole sanitaire renforcé, cette contrainte horaire qui condamne le service du soir a eu pour conséquence pure et simple de nous obliger à fermer, se désole l’UMIH (Union des métiers et des industries de l’hôtellerie). Nous qualifions ces mesures de punitives à l’encontre du secteur. Elles eurent pour but de dissuader une minorité de personnes qui ne respectent pas les précautions sanitaires de base, mais elles auront des effets dramatiques sur la profession. » 

En fin d’année, 15% des CHR pourraient baisser le rideau

Selon l’UMIH, qui compte en France 168 000 restaurants, 39 000 hôtels et 38 800 bars et cafés, « 15% des établissements pourraient mettre la clef sous la porte avant la fin de l’année, soit plus de 30 000 bars, restaurants ou hôtels ». De quoi laisser sur le pavé plus de 220 000 personnes sur les 960 000 actifs évoluant dans ce secteur. Aussi, pour endiguer la crise, auprès des CHR, l’État prévoit de distribuer des aides publiques – jusqu’à 10 000 € par mois et par établissement pouvant justifier d’une perte de chiffre d’affaires supérieure à 80%.

Il prend également en charge le chômage partiel. Mais malgré la prolongation de ces aides du gouvernement (chômage partiel donc, exonération de charges, ou encore fonds de solidarité), il est estimé que les plus fragiles ne survivront pas. Pourtant, la période d’été – de juin à août – n’a pas été si catastrophique qu’annoncé avec une baisse du chiffre d’affaires de 6,7% par rapport à la même période l’année précédente… même si de grandes disparités ont été observées, avec une baisse de 20% du CA en Île-de-France contre une hausse de 8% en Occitanie. Reste qu’avec le couvre-feu, les lieux qui réalisaient en moyenne 70% de leur CA le soir se trouvent bel et bien en péril.

Les bars et les restaurants sont-ils réellement des lieux de contamination ?

David Zenouda, porte-parole du collectif Restons ouverts : « C’est tout un pan de l’économie qui va disparaître. Après avoir réussi à tuer les discothèques, c’est le monde de la nuit qui passera de vie à trépas. Notre sainteté Veran est parti en croisade contre ce Draculavirus qui sort après 21 heures… Nous allons continuer de lutter parce qu’on est capables de mettre des protocoles sanitaires même dans les bars de nuit ! » Il faut dire que dans les faits, quelques questions demeurent, notamment sur l’impact de la fréquentation des bars et des restaurants dans la contamination.

Car qu’en est-il réellement ? Selon Santé publique France, « sur les 34 767 clusters (soit 3 cas confirmés ou probables dans un même groupe issu d’un rassemblement) recensés depuis le 9 mai, 1 070 sont toujours, en date du 8 octobre, en cours d’investigation ; 35% concernent le milieu scolaire et universitaire ; 20% : les entreprises ; 11% : les établissements de santé ; et 8%, les événements publics et privés liés à un rassemblement temporaire ».

Alors où apparaissent les bars et les restaurants ? À proprement parler, ils ne sont pas clairement identifiés.

Si un cluster concerne l’équipe d’un établissement, il trouve sa place dans la catégorie « entreprise ». S’il s’agit de clients, il apparaît dans « les événements publics et privés liés à un rassemblement temporaire ». Aussi, rien ne laisse présupposer qu’ils soient plus des lieux de transmission que d’autres. Si ce n’est cette fameuse étude que ne cesse de brandir le ministre de la Santé…

La « fameuse » étude de notre cousin d’Amérique…

« Nous avons des études qui démontrent qu’il y a quatre fois plus de risques d’être contaminé quand on a fréquenté un bar dans les jours avant», assène Olivier Veran. Mais d’où sortent ces études ? Dans les faits, c’est une seule et même enquête qui appuie les propos du ministre de la Santé. Et elle n’est pas française, mais américaine.

Conduite en juillet dernier, elle a été menée dans 11 États allant de la Californie au Colorado en passant par l’État de Washington, l’Ohio, la Caroline du Nord, le Tennessee…

Sur les 314 sujets, des personnes symptomatiques de plus de 18 ans venues passer des tests, 154 étaient infectées tandis que 160 autres n’avaient pas contracté la maladie. Quoi qu’il en soit, tous ont dû répondre à une batterie de questions portant essentiellement sur les lieux qu’ils avaient fréquentés 14 jours avant l’apparition des symptômes – salle de sport, transport en commun, bureau, église, coiffeur, bar, restaurant…

En constat, ils ont remarqué, que l’ensemble des sujets positifs et négatifs avaient porté un masque de manière quasi similaire, à l’exception des bars et des restaurants. Toutefois, les cas positifs étaient deux fois plus nombreux à avoir fréquenté un bar ou un restaurant les deux semaines précédant les premiers symptômes. Cette seule et unique étude réalisée outre-Atlantique, justifie-t-elle de braquer nos regards sur ces seuls endroits ? Il reviendra à chacun d’en juger. 

Article issu du magazine BARMAG n°149 de novembre 2020. Pour vous abonner, cliquez-ici !

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Écrit par Gérald Dudouet

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