Le célèbre fournisseur indépendant de boissons sur l’Île-de-France a subi de plein fouet la crise sanitaire. La réouverture des terrasses dès le 2 juin annonce enfin un regain de son activité. Rencontre avec son directeur général délégué, David Zylberbogen.
Milliet a continué à fonctionner pendant les 8 semaines de confinement ?
Nous sommes restés ouverts pour les lieux de vente à emporter, les cavistes et les supérettes, et nous sommes restés en contact avec tous nos autres clients. La plus grande partie du personnel était au chômage partiel. Pas le service comptabilité, qui préparait le bilan et les demandes d’aide de l’État. Nous en avons profité pour contrôler notre stock (date de validité, quantité…) afin d’être prêt pour la réouverture. Notre catalogue comporte 4 500 références et notre mission est de développer une gamme spécifique pour chacun de nos points de vente.
La conservation des fûts de bière a été difficile pendant cette fermeture des CHR ?
Dans les fûts de bière, il n’existe pas de DLC. On est face surtout à une problématique organoleptique : le goût de la bière va changer mais celle-ci ne sera pas avariée. Les gros brasseurs comme Heineken, Kronenbourg, Duvel, Asahi et House of Beer se sont engagés à prolonger de quelques mois la DDM (Date de durabilité minimale). De la part des brasseurs artisanaux, aucune position n’a été prise. Leurs bières disposent de degrés plus importants et sont plus résistantes. Si elles sont stockées dans des lieux entre 6 et 9 degrés, le risque de dégradation aromatique est moindre.
Le 28 mai, Édouard Philippe a annoncé la réouverture le 2 juin des bars et restaurants en zone verte et celle des terrasses pour l’Île-de-France. Comment avez-vous réagi ?
L’annonce de la date a été une excellente nouvelle puisque tout le monde s’était mis en tête le 15 juin. Seconde bonne surprise pour notre secteur : l’ouverture des terrasses en Île-de-France, et les mesures engagées par Anne Hidalgo pour autoriser de nouvelles terrasses sur l’espace public concernant les bars, cafés et restaurants jusqu’au 30 septembre par l’intermédiaire d’une déclaration sur le site de la mairie. Suite à la prise de conscience collective de l’état d’urgence dans la restauration hors domicile, la dimension économique est traitée en parallèle de la dimension sanitaire.
Que pensez-vous des mesures sanitaires mises en place ?
L’UMIH et le GNI ont été très actifs pour instaurer un guide sanitaire dédié aux CHRD, et très présents pour épauler le gouvernement. Concernant les menus, les mesures ont été bien pensées puisque l’esprit carte à l’ardoise est bien implanté dans les établissements et le QR code est totalement dans l’air du temps. Par contre, le port du masque obligatoire dans la salle risque d’effrayer la clientèle.
Qu’éprouvent vos clients face à leur réouverture ?
Une grosse partie de notre clientèle parle de rouvrir seulement en septembre. Devant l’absence de touristes étrangers et la forte possibilité d’une baisse du chiffre d’affaires dès la remise en marche de l’établissement, la situation actuelle est loin d’être rassurante. Les grosses structures du CHR peuvent se permettre de patienter. A contrario, les petites affaires sont soumises à de lourdes charges non reportées, dont le loyer du local.
Comment voyez-vous l’avenir économique de Milliet ?
Un tiers de notre clientèle possède une terrasse, donc je pense que notre activité va redémarrer à hauteur d’environ 30%. Si cet été elle passe autour de 50-60%, ce sera une excellente nouvelle. Notre portefeuille est concentré sur des bars de quartier, d’ambiance, à cocktails et de nuit, fréquentés surtout par des Parisiens. Il s’agit essentiellement de trentenaires ou de quadragénaires avec une vie sociale très développée, qui aspirent à retrouver ses habitudes d’un verre le soir à l’extérieur.
Autre paramètre : les personnes isolées en télétravail auront besoin de prendre l’air plus tôt dans l’après-midi en fréquentant les terrasses et bars ouverts.
Va-t-on découvrir de nouveaux modes de consommation dès la réouverture des CHR ?
On remarque déjà que les produits dotés d’une forte connotation locale, bio et artisanaux sont plébiscités pour leur dimension personnelle et sociétale. Les gens recherchent des boissons avec du sens.