Laurence Marot
Le vainqueur de The Bartenders Society 2020 et le chef étoilé de la table de Clarance signent un ouvrage dédié aux accords mets-cocktails. Rencontre avec Luc Degroux et Alexandre Miquel, 2 créatifs du nord.
Comment a démarré ce projet ?
Alexandre Miquel : Le photographe Yoann Gloaguen, alias Monsieur Human, cherchait depuis quelque temps un duo chef-barman capable d’écrire un livre sur les accords mets et cocktails. Il m’a soumis le projet, et j’ai tout de suite pensé à Luc pour m’accompagner. Nous partageons la même vision et la même méthode de travail.
Comment avez-structuré l’ouvrage ?
Luc Degroux : Nous avions déjà un pied à l’étrier pour cet exercice. De mon côté, j’avais eu la chance d’expérimenter le sujet avec Diego Delbecq, le chef étoilé du Rozó à Lille. Nous nous sommes posés tous les 3 pour définir les différents chapitres ouverts à tout type de public. Nous avons pensé aux différents moments de convivialité dans la journée : apéro, brunch, déjeuner, dîner simple et rapide, dîner d’exception. L’éditeur souhaitait des recettes faciles avec des ingrédients abordables, sauf pour les dîners d’exception où nous avons utilisé des produits plus raffinés.
L’accord mets et cocktail est un exercice difficile. Quelles ont été vos méthodes ?
LG : Nous avons travaillé à partir de projections gustatives et aromatiques. Alexandre me transmettait ses recettes, tandis que je lui proposais des accords. Nos créations rendent hommage aux terroirs, non seulement du Nord, mais aussi de Normandie ou encore d’Italie. Pour mes cocktails, je me suis inspiré de la structure des grands classiques en créant des accords en harmonie avec le plat ou, parfois, en jouant sur des contrastes de saveurs. L’objectif ultime était toujours de sublimer les ingrédients du duo mets cocktail. J’ai également utilisé des techniques comme la clarification ou le fat
wash, pour apporter une dimension culinaire à mes créations.
AM : J’ai pensé comme un lecteur plutôt que comme un chef étoilé, en m’inspirant de mes souvenirs d’enfance et de la cuisine du quotidien. Pour les dîners d’exception, j’ai aussi imaginé des recettes qui pourraient figurer sur la carte du restaurant.
Vous proposez même des cocktails sans alcool au moment du déjeuner !
LD : Nous sommes à mi-chemin entre le côté healthy et le côté plaisir. Nous avons misé sur différentes recettes d’infusions, qui accompagnent parfaitement les plats.
Quels sont pour vous les accords les plus simples ? les plus compliqués ? et celui que vous préférez ?
LD : L’accord le plus simple et le plus harmonieux pour moi est le trio de mignardise avec un cocktail dans un esprit petit-beurre à base de cognac VS, de Lillet infusé au sarrasin, une décoction de thé et du sirop de sucre.
AM : Le pairing le plus compliqué, il me semble, est le plat de ris de veau, céleri, vanille. Il fallait trouver la bonne association avec le céleri épicé, la douceur de la vanille, le croustillant du ris de veau et la sauce corsée. Luc a réussi le défi de trouver une recette dans la continuité de ses saveurs avec un whisky single malt, un vermouth végétal et un jus de pomme infusé au céleri et un sirop de vanille.
LD : Mon accord préféré est le petit pois à la française associé à une création à base de cognac XO, de Lillet blanc, de sirop concombre et reinedes-prés, du jus de citron et tonic Hysope. Elle respecte le côté français et l’empreinte environnementale. Et c’est un clin d’oeil à ma rencontre avec Dominique Touteau, ex-maître de chai de la maison de cognac Delamain !
« Un cocktail à table », de Luc Degroux, Alexandre Miquel et Yoann Gloaguen. Éditions Marabout. Prix : 25 €. Sortie le 9 octobre
