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BRASSERIE-DISTILLERIE, LA TENDANCE DE LA DIVERSIFICATION

Pour certaines brasseries, produire uniquement de la bière n’est plus la seule ambition. Leur savoir-faire autant que leur passion les conduisent à s’attaquer à la fabrication de spiritueux et à la distillation.

Rencontre avec 2 brasseries en pleine mutation.

La Société des Alcools à Papa : une nouvelle activité pour une brasserie en plein essor

Derrière ce nom insolite se cache la célèbre brasserie De Sutter des 2 frères normands et ingénieurs, Antoine et Frédéric De Sutter. Lancée en 2012 après une longue période d’essai de brassage, la société, basée à Gisors, symbolise la réussite dans le monde brassicole français.

« Dès le départ, nous avons cherché à faire des bières qualitatives, généreuses et avec un bon rapport qualité-prix », explique Antoine De Sutter. Premier succès : une gamme de bières du nom « les Folies », au profil aromatique accessible un rien houblonné, illustrée par de drôles de vaches normandes.

La brasserie de Sutter a ensuite enchaîné les collections qui ont séduit les beer lovers de toute la France : les cuvées bio « l’État sauvage » ; les bières traditionnelles avec 3 houblons « 3 Chariots » ; des séries limitées avec des recettes créatives en canette habillées par des artistes ; une bière sans alcool, « À la Cool »…

Près de 10 ans après sa création, cette institution emménage en octobre 2021 dans des locaux neufs hors du centre-ville.

« La brasserie était devenue trop petite et nous ne pouvions pas augmenter notre capacité de production. Pour éviter de stopper la production, nous avons mis 10 mois pournous installer dans le nouveau local. Aujourd’hui, nous pouvons brasser jusqu’à près de 80 000 hectolitres dans une démarche durable », commente le brasseur.


Un nouveau chapitre dans l’histoire de la brasserie De Sutter : le passage à la distillation

Depuis fin 2021, la Société des Alcools à Papa a repris les murs de l’ancien site de la brasserie.

« C’était une démarche complexe d’installer légalement la brasserie et la distillerie dans le même local. Nous avions envie de nous diversifier de manière horizontale et cela faisait un bon moment que nous souhaitions nous lancer dans la distillation. Le whisky est très proche de l’univers de la bière et nous avons été initiés au monde des spiritueux par notre oncle, qui produit de l’armagnac », explique Antoine de Sutter.

Une bonne étoile arrive en même temps sur le chemin des frangins : le maître distillateur anglais Liam Hope, en quête d’une distillerie en France.

« Nous avons monté ensemble le projet et nous avons beaucoup appris auprès de lui. La distillation est simple en théorie, le plus compliqué c’est de trouver le juste goût », révèle l’expert en brassage, qui déniche en Écosse les outils de production adaptés aux besoins de la distillerie : 2 alambics Forsyths, de 50 et 25 hectolitres.

Depuis la mise en fonctionnement de la distillerie en 2022, les frères De Sutter n’ont pas perdu de temps. En 8 mois, plusieurs styles de spiritueux sont déjà sortis des cuves  : un whisky lancé sur le marché en 2025 ; un gin agrémenté de lavande ; 2 rhums créés avec du miel de caña provenant d’Espagne, fermenté et distillé par leurs soins ; un blanc à 50%, et un brut à 72% ; et un panel de rhums arrangés.

Pour créer un premier buzz, la Société des Alcools à Papa a déjà sorti le whisky GrandChamp, un blend à base des whiskies de plusieurs distilleries et assemblés par Liam Hope. Un travail déjà couronné d’une médaille de bronze au World Whiskies Awards 2023.

Côté distribution, pas d’inquiétude pour nos 2 entrepreneurs !

« Ce sont les mêmes canaux que ceux de la bière de la brasserie. Nous ciblons les amateurs de nos produits mais aussi de nouveaux consommateurs connaisseurs en spiritueux », précise Antoine De Sutter. Un avenir très prometteur pour la Société des Alcools à Papa.

La brasserie-distillerie Veyrat : une recherche du terroir

C’est en pleine campagne, dans la commune de Marcellaz-Albanais (Haute-Savoie) qu’Emmanuel et Aline Veyrat ont bâti leur brasserie. Depuis 9 ans, leurs bières houblonnées bio, symbolisées par un cerf, régalent le gosier des locaux comme des touristes.

À l’origine, Emmanuel est plombier-frigoriste et la bière est loin de son univers. C’est en faisant le tour à vélo de l’Amérique du Nord et du Sud que le sportif savoyard plonge son nez dans le monde des microbrasseries. Dès son retour au bercail, il se forme aux techniques du brassage et lance sa structure dans le garage de ses parents jouxtant l’exploitation agricole familiale. Aline, son épouse, ancienne maîtresse d’œuvre en travaux publics, l’a rejoint dans l’aventure à plein temps il y a 5 ans. À quatre mains, le duo brasse une gamme de mousses aussi bien classiques (blondes, rousses, IPA) qu’éphémères comme une IPA sans alcool à 0,4%.

La brasserie dispose de quelques atouts : de l’orge cultivée par son frère et plusieurs pieds de houblons qui donnent l’occasion au couple d’organiser chaque année une fête du houblon accueillant jusqu’à 1 000 convives.

Des premiers pas dans la distillation avec le limoncello

Cet été, Emmanuel et Aline Veyrat embouteilleront leur premier whisky : un blend endormi depuis 3 ans dans des fûts de vin blanc de Savoie, de bourbon et de Pedro Ximenez.

« Nous avons toujours eu l’envie de créer un whisky local. Le déclencheur fut l’arrivée de la malterie Malt’in Pott à 30 km de la brasserie, qui nous a permis de malter l’orge de l’exploitation agricole », souligne la propriétaire qui a fait ses premiers essais dans la distillation en 2019 avec un limoncello réalisé à partir d’un distillat de céréales et de citrons bio de Sicile.

Pendant le confinement, le couple s’attaque au whisky mais aussi au gin et à un élixir savoyard – une boisson ressemblant à la chartreuse – avec leurs nouveaux outils : 2 alambics pot stills de 500 et 300 litres venus d’Espagne.

« Notre savoir-faire en tant que brasseur nous a permis de créer de manière autonome notre whisky, mais nous avons reçu quelques conseils du distillateur de la maison Filey Bay (Yorkshire). Nous prévoyons de sortir tous les ans un whisky différent, avant de lancer dans 5 ans notre whisky permanent. Notre objectif : proposer une cuvée accessible et avec un profil plutôt fruité. Pour la première édition, nous aurons entre 1 000 et 1 500 bouteilles. »

En attendant la sortie de leur joyau malté, la maison propose aux particuliers des ateliers de 3 heures pour confectionner du gin autour de 9 mini-alambics et pour découvrir la distillerie.

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Écrit par Laurence Marot

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